Infoclimat

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Fred est responsable technique chez ELSYS Design à Vallauris. Sur son temps libre, il est vice-président d’Infoclimat, une association incontournable dans le domaine de la météo en France et au-delà. Rencontre avec un passionné.

Infoclimat

Q : Peux-tu nous présenter Infoclimat ?

Il s’agit d’une initiative née à la fin des années 1990. C’étaient les débuts d’internet et quelques groupes d’amis voulaient partager leurs relevés météo ainsi que leurs photos de phénomènes climatiques. On parle ici par exemple de passionnés qui se lèvent à 4h du matin pour prendre des photos d’orages, ou noter des relevés de pluie.

Ils ont créé un premier site web « OrageNet », très simple, puis un second en 2001, le trafic augmentant en parallèle, ce qui a nécessité un financement. En 2003, l’association loi 1901 Infoclimat est née avec une quarantaine de membres, avec pour objectif initial de subvenir aux besoins informatiques du site.

 

Et aujourd’hui ?

L’association a beaucoup changé, notamment du fait du développement d’Internet et de l’intérêt du grand public pour le changement climatique. Nous sommes 1800 adhérents et nous nous positionnons comme un apporteur neutre d’informations climatologiques et d’analyses que nous partageons gratuitement avec le grand public ; ces informations sont également reprises par des professionnels. Pour ce faire, nous avons installé un réseau de stations météo complémentaire à celui de Météo France, cela représente 600 à 700 stations réparties sur toute la France, dont une partie sont financées à 100% par l’association.

Nous avons enfin un volet pédagogique, puisque nous avons notamment repris l’opération « Météo à l’école », qui consiste à animer un réseau de stations météorologiques à vocation éducative (mathématiques, physique, technologies), implantées dans des établissements d’enseignement secondaire sur l’ensemble du territoire français.

 

De 40 à 1800 adhérents, quelle croissance ! Mais vous êtes parvenus à garder votre esprit initial ?

Oui, absolument. Nous restons extrêmement attachés à notre statut associatif. Nous fonctionnons uniquement grâce à l’investissement bénévole d’une équipe de passionnés, nous nous auto-finançons et n’utilisons pas de « trackers » publicitaires. C’est cette passion qui nous unit, et que nous retrouvons au sein de chacun de nos adhérents, qui n’ont pas de profil type : le plus jeune a 10 ans et le plus ancien 89, nous sommes répartis sur toute la France et toutes les catégories socio-professionnelles sont représentées. Cette diversité fait notre richesse.

Infoclimat 2

Crédits photos de l’article : Baptiste Monterroso, Kévin Leclercq, Serge Zaka, Janis Brossard, Vianney Rudent, Florian Bigand et Yannick Lecenes / Infoclimat. 

Le rôle de Fred dans l’association

Quel est ton rôle dans l’association ?

Je l’ai rejointe en 2006, alors pré-adolescent de 12 ans passionné par l’étude des sciences en général et des phénomènes climatiques en particulier. Mes parents m’ont raconté que tout petit, je regardais déjà la neige tomber et ils devaient me demander de fermer la porte pour que je ne prenne pas froid.

En 2009, après m’être auto-formé, j’ai commencé à aider la personne qui s’occupait du site web. Cette dernière est partie et j’ai pris sa suite. On parle aujourd’hui de plusieurs milliards de données stockées et de dizaines de Téraoctets de stockage de précieuses archives météorologiques, consultées par 7 millions de visiteurs uniques par an. En hiver, nos serveurs voient passer 5000 requêtes par seconde !

En 2013, j’ai rejoint le conseil d’administration et depuis 2015, je suis vice-président.

 

Son implication

Vu l’ampleur de l’association, j’imagine que ça pourrait être un travail à plein-temps. Qu’est-ce que cela implique dans ta vie quotidienne ?

J’y passe 10 à 20 heures par semaine, mais ça pouvait monter à 40 heures quand j’étais étudiant, sans parler de mes congés, grignotés par des déplacements pour le compte de l’association, ou simplement des journées à plein temps à coder pour améliorer le site. Cela reste pour moi un défi organisationnel constant.

En plus de la gestion du site, j’ai deux grandes catégories de tâches à mener.

Tout d’abord, l’animation de l’équipe d’une cinquantaine de bénévoles (rédacteurs, modérateurs, personnes qui vérifient la qualité des données, …), en « télétravail » depuis toujours, puisque répartis aux quatre coins de la France.

Ensuite la mise en place de partenariats. Par exemple, nous avons réussi à installer une station météo au sommet du mont Ventoux en 2015. Une station Météo France existait depuis 1882, mais elle avait été fermée en 1968 pour raisons budgétaires. Le site est situé dans un parc naturel, donc il a fallu obtenir des autorisations administratives, mais aussi trouver le bon contact à l’époque chez France Télécom pour négocier l’autorisation d’installer notre station en haut de leur tour, dont nous partageons les données avec Météo France. Tout cela a pris plus de 5 ans, pour 4 pages de contrat !

Infoclimat, inauguration station météo au sommet du Mont Ventoux

Inauguration de la station météo d’Infoclimat au sommet du Mont Ventoux, le 7 juillet 2016.

Partenariats

Justement, à propos de Météo France, quelles relations entretenez-vous avec eux ?

Le domaine de la météo est un business florissant, donc au départ, ils nous ont vu grossir et nous observaient avec une certaine méfiance, nous prenant pour des concurrents. Au fil des discussions, ils ont été rassurés quant à nos motivations et nous sommes devenus partenaires en 2010.

Au tout début, ils étaient particulièrement intéressés par les données de notre observatoire participatif, constitué d’un matériel de relevés météo qui répond aux normes et critères de l’OMM (Organisation Mondiale de la Météo).

Avec l’essor des satellites d’observation, ce partenariat a depuis été réorienté vers la mise en commun de nos stations météo, qui ont été installées et sont entretenues par nos membres. L’intérêt est d’améliorer la prévision de phénomènes de petite échelle (orages, pluies verglaçantes, neige, …), qui nécessite un maillage d’observations le plus fin possible.

En échange, Météo France partage également avec nous ses propres données habituellement non disponibles en libre accès et contribue à la formation de nos adhérents.

 

Avez-vous d’autres partenariats ?

Historiquement, les données météo étaient échangées sur un réseau mondial créé par l’OMM (le « GTS »). Les acteurs officiels de chaque pays y contribuaient, par exemple Météo-Canada etc. Depuis des années, nous récupérons ces données et y donnons un accès unifié sur notre site, cela évite de devoir consulter plusieurs sites nationaux qui proposent parfois beaucoup moins de données qu’Infoclimat (et sont souvent peu ergonomiques ou remplis de publicités).

De plus, comme nous en France, il existe des réseaux complémentaires de passionnés de météo, eux aussi rassemblés dans de petites associations, souvent régionales (Nice-Météo06, ROMMA,…). Nous discutons avec elles pour tenter d’unifier tout ça, toujours dans un esprit participatif et de partage.

 

C’est facile ?

Outre l’établissement préalable de relations de confiance entre les équipes, il faut notamment se mettre d’accord sur les modalités techniques (quel matériel ? quels transferts de données ?).

C’est fait avec les Italiens et les Belges, c’est en cours avec les Espagnols et les Portugais. Nous le faisons progressivement, car je suis le seul développeur pour notre site web et que ce dernier est pour l’instant uniquement en français.

 

Comme évoqué un peu plus tôt, le changement climatique est devenu un sujet brûlant. Comment vous positionnez-vous ? Avez-vous une démarche militante ?

Non, nous nous focalisons sur le recueil et l’analyse des données. Mais bien entendu, ces informations permettent ensuite d’alerter et nous soutenons les conclusions tirées par les scientifiques. Nos outils sont utilisés par des professionnels, notamment certains experts du GIEC, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, et c’est une très grande fierté pour nous.

 

Appel aux volontaires !

Pour conclure, as-tu un message particulier à passer ?

Oui, si un(e) ingénieur(e) AViSTO PHP / MySQL / JS était prêt à venir nous donner un coup de main pour le site web, nous serions intéressés !

Les ELSYS Design ne sont pas en reste non plus, puisque nous travaillons aussi par exemple sur les technologies LoRa pour interconnecter nos stations météo dans les zones sans électricité et sans réseau 4G !

J’espère que cette interview aura fait naître des envies de nous rejoindre…